Quatrieme journee au pays de Fidel. Au Blau Arenal Club (notre hotel), il y a des photos de Fidel partout - mais encore plus de photos de Che Guevara. A croire que ce sont les deux seuls heros de ce pays. Pas d'auteurs dignes de mention, pas de d'artistes celebres (et pourtant, moi qui esperais trouver des infos sur Jose Carlos Somoza, que je ferai lire a mes etudiants dans quelques semaines...).
On se demande bien de quoi Fidel et Guevara ont libere les Cubains. Samedi dernier, une visite a pied dans la Vieille Havane (la portion nord-est de la ville) nous a revele a quel point ce pays est pauvre. C'est d'ailleurs (malheureusement) un sentiment d'agacement qui nous habite depuis deux jours. La cause : visiter a pied la Vieille Havane, c'est s'exposer a la misere. Einstein affirmait que pour eviter de tomber, a velo, rien de mieux que de pedaler sans arret. A La Havane, il faut aussi rester toujours en mouvement, question d'eviter de se faire quemander de l'argent. C'en est fatigant.
Non pas que je sois insensible a la misere et a la pauvrete, mais il y a des limites. Peut-etre aurions-nous du cacher le bracelet bleu qui nous sert de passe-partout pour le tout-inclus sur le site de l'hotel.
Je vois d'ici les tenants de la gauche me lire et me traiter d'impitoyable capitaliste nord-americain sans coeur. Je le repete : je suis sensible a cette misere qui cotoie la luxuriance de la Vieille Havane, qui recele tellement de potentiel touristique architectural et historique. Certains musees de cette partie du monde sont magnifiques; seulement, on ne les entretient pas. Que font Fidel et ses acolytes? Ou sont-ils, ces tenants du socialisme exacerbe, pour prendre soin de leurs ouailles?
Pas moyen de faire 20 pas sans etre accoste par une pauvre ame en peine qui reclame son du. Une femme d'une trentaine d'annees ne nous a pas laches d'une semelle dans un depanneur grand comme ma main. On la croyait employee par le magasin. Elle nous a demande d'acheter des couches pour son futur bebe, pointant son ventre engrosse.
J'ai vu le manque de dignite d'une vieille femme qui rappelle la Grand-Mere du roman "Le grand cahier" d'Agota Kristof : prise d'une irrepressible envie d'uriner, la vieille se soulage sur un coin de rue, en plein milieu des badauds et des touristes, se contentant de soulever sa jupe pour laisser libre cours a son envie.
Les pauvres de La Havane ont appris a queter depuis leur taudis, a travers la fenetre (souvent la seule du logement), en tendant le bras.
Au marche public qui jouxte le Parque Infantil, le long de la riviere Entrada, aussitot qu'on se laisse happer, ne serait-ce que nonchalamment, par un stand de peintures faites parfois en serie par des artistes locaux, il suffit de 3 secondes (au mieux) pour que le tenancier du stand vous offre d'acheter quelque chose. Encore la, pas question de s'arreter. Il faut rester en mouvement, sinon les mouches vous collent dessus.
Insensibilite? Pas vraiment. Des touristes francais que nous avons croises - et qui etaient aussi exasperes que nous (et que les Ecossais, que les Allemands et que les Americains qu'ils avaient rencontres) - nous rappellent qu'il leur a fallu pres d'un an pour amasser l'argent leur permettant de venir a Cuba. Au pays de Fidel, nous sommes riches; mais chez nous, nous faisons parie de la classe moyenne, celle qui est surtaxee, celle qui ecope le plus souvent des fluctuations economiques.
Me plains-je le ventre plein? Je l'ignore. A La Havane, le Nord-Americain est percu comme un portefeuille ambulant. Trop de Cubains manquent de la fierte et de la dignite qu'il faut pour resister a la tentation de desenchanter le touriste qui vient, apres tout, enrichir (partiellement mais quand meme) le pays communiste de Fidel.
Depuis deux jours, c'est une impression de desenchantement qui nous habite lorsqu'on songe a La Havane. On y donnera une seconde chance avant de repartir pour le Quebec.
SL
lundi 14 janvier 2008
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